Non, non, je ne souhaite pas évoquer aujourd'hui la série française qui s'étale sur TF1 un certain jour de semaine. J'ai choisi tout exprès un titre correspondant aux plus grands succès télévisuels du moment, afin de faire le buzz sur les réseaux sociaux ;-) Attendez-vous donc à ce que mes prochains billets s'intitulent par exemple "Les experts du télétravail" ou encore "Téléburo Paradis", je ne sais encore si j'oserai le "Téléburo, ange gardien" mais j'y songe sérieusement.
J'aimerais donc parler aujourd'hui des réseaux sociaux, dont Facebook essentiellement, qui ont cette particularité, parfois un tantinet déconcertante, d'exposer les facettes, plus ou moins brillantes, de chacun de nous, aux yeux de ceux qui ne les soupçonnaient pas forcément.
Prenons Jean-Claude par exemple, le taciturne informaticien de votre ancienne boite, qui vous saluait chaque matin d'un hochement de tête silencieux qui ne faisait même pas frémir les épaisses lunettes fixées sur son nez fin. Tout le monde aime Jean-Claude. On pense savoir qui il est et, même lorsque par miracle, tout semble fonctionner, on lui demanderait presque un coup de main ne serait-ce que pour lui accorder ce plaisir étonnant qu'il paraît prendre à trifouiller des fils colorés et déchiffrer des codes venus d'ailleurs. Il semble faire partie du décor gris de cette jungle austère dans laquelle serpentent moult câbles électriques sous les yeux rouges d'appareils étranges. Tout le monde aime Jean-Claude, l'homme qui parle aux ordinateurs, et uniquement à eux, et semble avoir ce don précieux de savoir leur redonner vie. De 7h du matin à 7h du soir, Jean-Claude intervient sans se plaindre, sans le moindre signe de découragement ou d'exaspération, sans la moindre expression d'ailleurs, sur son visage pâle, et on imagine aisément qu'une fois rentré chez lui, dans cet appartement que l'on se représente sombre et peuplé des mêmes engins aux yeux menaçants, Jean-Claude prendra de nouveau place devant un écran pour y parler ces langues d'un autre monde, auxquelles personne d'autre n'entend rien.
Jusqu'à ce qu'un soir, Jean-Claude vous demande comme "ami" sur Facebook. Passé le stade de la surprise (Jean-Claude a un profil fb ? Jean-Claude a des amis ? Jean-Claude veut qu'on soit amis fb ?), vous acceptez, bien entendu et, ne mentons pas, vous filez immédiatement en quelques clics survoler ce profil d'informaticien triste. Et là… Vous vous apercevez très vite que depuis 2005, Jean-Claude, dans ses pantalons de velours et ses chemises rayées sous des pulls cols V, Jean-Claude et ses regards fuyants derrière des montures Seventies, Jean-Claude dont l'émotion la plus vivace s'exprime dans le lever d'un sourcil broussailleux, ce Jean-Claude s'éclate, beaucoup plus que vous d'ailleurs, tous les samedis soirs, sur la musique punk de son groupe de potes déjantés.
Nous aurions pu, de la même façon, évoquer Gisèle dont les cils bleutés, le nez fripon et le postérieur moulé dans des jupes trop courtes laisseraient imaginer des soirées alanguies sur des peaux avachies (ou inversement…), étalant aux yeux de tous sa chaude cheminée, ornée de personnages aux postures suggestives, et qui finalement apparaît sur le réseau tant visité dans une robe fleurie entourée de ses chats, telle mémère en campagne, bien loin de nos torrides fabulations.
Quant à Thomas, le petit coursier au visage d'ange, auquel on prête des liaisons clandestines avec de jeunes bimbos énamourées, ou pour certains avec de délicieux éphèbes enflammés, Facebook le cafteur nous renseigne illico sur sa passion la plus folle : c'est en effet les mains plongées dans une tiède humidité que le beau coursier passe tous ses libres matins, tâtant truites et anguilles dans les eaux claires des rivières alentour.
Cessons donc là ces commérages pour en venir à la question qui vous tourmente désormais, suite à ces découvertes troublantes : comment envisager votre propre présence sur Facebook, mêlant activités toutes personnelles et missions professionnelles qu'en tant qu'indépendant, vous êtes tenus de mettre en lumière ?
Facebook, nous l'avons vu, peut vous donner un petit côté schizo, qui n'est pas dénué de charme, mais peut déconcerter un éventuel client. Imaginons celui-ci, soucieux de mieux connaître le prestataire pressenti et déniché par M. Google que vous avez dans la poche grâce à tous vos efforts en matière de référencement, imaginons donc Denis, votre client potentiel, qui furète sur les réseaux sociaux à la recherche de cette perle qui se dit rare et se retrouve face à une image facebookée de celui-ci, l’œil hagard et le cheveu crasseux, vidant un dernier Pastis au Camping des Flots Bleus… Imaginons encore que Denis, lui-même adepte du camping et du Pastis, ne se décourage pas pour autant et garde l'esprit ouvert lorsqu'il commence à tenter de décrypter les commentaires sous la photo. Il est fort à parier que devant l'enchaînement des posts, écrits pour certains avant et après ce fameux dernier Pastis, Denis hésite un tantinet avant de vous confier la refonte globale de son site Web.
La meilleure option reste donc sans doute de créer une page Facebook professionnelle et de vous afficher en string tuba uniquement sur le compte personnel Facebook qu'il serait alors plus prudent de garder privé en désactivant le partage public des posts.
Même si alors, vous privez le monde de vos biceps saillants devant la tente montée en moins de deux minutes, photo du chrono de Nadine pour preuve, vous récupérerez peut-être Denis qui n'aura trouvé sur votre page Facebook qu'un sobre reflet de vous-même.
Sur ce, je file peaufiner la mienne (la transition est, n'est-ce pas, d'une subtilité déconcertante ?), dont je vous mets le lien ci-dessous (et l'incitation tout aussi habile…:-) :
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